mardi 4 mars 2008

"la carrière du libertin" de Stravinsky



Opéra: Olivier Py met en scène "la carrière du libertin" de Stravinsky


PARIS (AFP) - Olivier Py a fait lundi soir des débuts très attendus à l'Opéra de Paris en mettant en scène et en lumière, avec ses néons familiers, "The Rake's Progress" ("la carrière de libertin") de Stravinsky, dont il tire une réflexion plus noire que blanche sur la vanité de l'homme.

Cette nouvelle production, à l'affiche du Palais Garnier pour huit autres représentations jusqu'au 24 mars permet de réparer une double anomalie.

D'abord, le principal opéra d'Igor Stravinsky (1882-1951) n'avait pas été donné à l'Opéra de Paris depuis plus d'un demi-siècle: dans la foulée de sa création à Venise (1951), il avait été joué à la salle Favart à partir de 1953, mais pour 27 représentations seulement.

En outre, Olivier Py, 42 ans, l'un des metteurs en scène français les plus doués de sa génération, a déjà signé huit productions lyriques de Nancy à Moscou en passant par Nantes, Edimbourg et surtout Genève, mais il n'avait curieusement jamais eu les honneurs du premier Opéra de France.

Ces débuts n'étaient d'ailleurs pas prévus. Cependant, le Suisse Luc Bondy ayant déclaré forfait pour raisons de santé, Olivier Py a accepté, malgré ses nouvelles fonctions de directeur du théâtre national de l'Odéon, de monter un projet en quelques semaines.

Ce catholique flamboyant avait de bonnes raisons d'accepter de faire sienne une histoire qui rejoint sa préoccupation d'un théâtre philosophique et poétique.

"The Rake's Progress" raconte la déchéance de Tom Rakewell, qui renonce à son idylle avec Anne Trulove pour embrasser une vie de débauche au terme d'un pacte faustien... et finir à l'asile psychiatrique.

Olivier Py résume ce propos en composant avec un crâne humain, des livres anciens et un sablier une "vanité" (nature morte en vogue notamment au XVIIe siècle) qui ne désertera pas son plateau pour dire la fragilité de l'homme face au savoir et au temps.

Comme toujours, son spectacle s'appuie sur une forte scénographie signée de Pierre-André Weitz, dont les modules métalliques noirs, par la magie de la mobilité et de la transformation, peuvent faire apparaître, en contrebas du nid d'amour de Tom et Anne, le bordel où Rakewell se perdra bientôt.

Ce décor unifié, éclairé par des néons déjà croisés chez Py ("Tannhäuser" de Wagner notamment) et passant d'une couleur (rouge, bleu, blanc, jaune) et d'une esquisse (soleils, roues...) à l'autre, concourt à la cohérence d'un propos qui a le mérite de ne pas brouiller un excellent livret.

Mais ce "Rake's Progress" plutôt sombre aurait pu être moins propret, plus caustique (la "femme à barbe" de la mezzo américaine Jane Henschel est l'un des rares motifs de drôlerie) et plus émouvant (la soprano texane Laura Claycomb y contribue modestement).

Deux prises de rôles sont à saluer: celles du ténor anglais Toby Spence (Tom Rakewell), voix aussi caressante que rayonnante, et du baryton Laurent Naouri (Nick Shadow), bel acteur méphistophélique, que Py met au centre de sa lecture.

La déception vient de la fosse: le chef d'orchestre britannique Edward Gardner peine à donner souffle et tension à la partition néo-classique de Stravinsky, qui requiert une mise en place autrement plus nette.

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